Manger…
“Touristes sauvages”, nous voila bien nommes! En plus de se pointer sans prevenir, seuls guides par la vie, ils veulent travailler!! La chose tombe a pic: Ira propose de nous loger en echange d’un coup de main au jardin. Son homme est parti pour 10 jours en amont de la riviere, et c’est le moment de tout semer. Sans oublier le cagnard qui oblige a faire de nombreux aller-retours pour chercher de l’eau au puit des voisins.
Ira ne s’emmerde pas avec les sentiments. Il lui faut vivre, avec ses 3 enfants, et les nourrir tous les jours. Pas de quoi s’emouvoir sde sang verse. “Y’a tout un tas de trucs que les gens ne veulent pas faire… les chats par ecemple: les gens veulent des chats, et puis le jour ou ils en ont trop et qu’ils ne peuvent plus les assumer, ben ils ne veulent pas non plus les tuer! Moi ca me derange pas, du moment qu’on me paye!”
Toute leur vie pourrait tourner autour de la quete de nourriture si l’argent n’avait pas tout detrone. Mais chez les Udeges, pour obtenir de l’argent, il faut d’abord savoir ramener de quoi manger. La saison des fougeres est en train de se terminer, mais Ira et sa soeur Raia nous embarquent pour une derniere cueillette, avant que les jeunes crosses ne s’ouvrent trop et deviennent immangeables. Ira n’y croyait pas trop, mais une fois les pieds dans les hautes herbes, on ne peut plus y sortir le nez. Des fougeres on en a trouve, plus que necessaire pour faire un bon diner. On aurait pu en ramasser de quoi remplir quelques bocaux (une fois les fougeres salees), mais a quoi bon se’embeter si ca suffit pour aujourd’hui?! Y’avait aussi de l’angelique et du kuretchka, bon a bouillir pour des soupes ou des salades. Mais pour le coup Ira prefere jeter son devolu sur le muguet et quelques autres fleurs a la bonne odeur. Apres les fougeres fallait trouver de la viande. Elles auraient bien egorge le bouc d’une voisine (qui nous offre pourtant genereusement lait, the, pain et miel de saison). “Du bouc?? - Ben quoi, on mange de tout. ici, je t’ai dis!” Leurs yeux brillent quand elles evoquent ce moment ou le gibier tombe, et se ramene en morceaux a la maison.
Sur le retour l’oeil exerce de la Raia tombe sur des champignons de saule. L’exitation grandit. J’adore. Merci Dame Nature de ta generosite, elle nous rend heureux.
Le lendemain c’est Kolia, le mari de Raia qui mene la bande a la riviere. Il lui fallait bien un accolyte arme pour assurer la securite de notre effectif, vulnerabilise par notre presence. Les pecheurs n’emportent pas que leur canne quand ils vont a la peche. Fusil en bandouillere, hors de son etui, pret a servir. Un homme devant, un autre derriere. Question de viande en premier lieu, puis de securite. Les Ours se cherchent ces temps-ci, et n’hesitent pas a attaquer. Tomber sur un Tigre est toujours probable, ici, ce n’est pas une legende. Mais surtout, on sait jamais, peut-etre un animal s’offrira a nos casseroles.
La peche en riviere, c’est une vraie ballade. Le poisson n’est pas bete, si on l’attrappe pas du premier coup, autant migrer un peu plus loin. Avec leur experience, les gars remplissent bien vite leur nacelle de beaux xharius arc-en-ciel, celui qui aime les forts courants. Nous derriere on recolte ce qui reste de Galian, qui n’est pas deja en soi un gros poisson. Quelques jolis lenok finiront de garnir notre grillade du soir. Pour la pause tchai, au lieu d’ouvrir une concerve, Raia debite du poisson frais qu’on mangera cru en fines lamelles. Micha, lui, n’en veut pas. “T’es pas un vrai Udege, alors, na!” Faut dire qu’avant, le poisson servait meme a faire des vetements!
… euh, celui la c’est du gros, peche dans la grosse riviere, d’une toute autre facon.